Révéler la composition chimique de fossiles organiques entiers en 3D !

Publication dans Science Advances

Une équipe internationale conduite par le laboratoire IPANEMA, et constituée de trois autres laboratoires CNRS (ISYEB, IMPMC et LRCP), de l’Université de Lausanne et de trois installations synchrotrons (SOLEIL et ESRF en France, SLAC à Stanford, États-Unis) vient de montrer qu’il était possible d’établir la composition en chaque point d’un fossile organique à partir de l’utilisation totalement innovante d’une méthode issue de travaux fondamentaux en spectroscopie des rayons X.

L’étude des matériaux fossiles fait appel depuis une quinzaine d’années à l’imagerie 3D par tomographie de rayons X, comparable au scanner médical. La tomographie permet l’étude des motifs microscopiques nécessaires à la compréhension de l’évolution des espèces, de leur physiologie et des mécanismes de fossilisation. Elle produit des images « en noir et blanc » indicatives de la densité des matériaux, comme une radiographie médicale montre l’absorption relative des différents tissus, mais ne permet pas d’obtenir la composition moléculaire interne des fossiles. D’autres méthodes, comme l’imagerie de fluorescence X, permettent de former une image chimique, mais sur des fossiles plats uniquement.

Avec l’imagerie Raman de rayons X 3D, une petite fraction de l’énergie des rayons X avec lesquels on éclaire un matériau est transférée à ses électrons par diffusion inélastique, produisant un signal détectable pour déterminer la composition chimique de celui-ci. L’équipe est parvenue à coupler cette méthode avec une instrumentation avancée utilisant les qualités de focalisation, de résolution en énergie et de pénétration du rayonnement X synchrotron permettait d’obtenir la composition en chaque point du fossile, en 3D.

Elle a ainsi démontré qu’une fourmi fossile exceptionnellement conservée dans l’ambre et vieille de 53 millions d’années avait conservé des signatures moléculaires de chitine, un sucre complexe extrêmement résistant utilisé par les insectes comme constituant structural principal de leur exosquelette. Les chercheurs ont également constaté que la surface de l’insecte qui avait été mise en contact de la résine la première avait été mieux préservée chimiquement que celle qui avait été recouverte plus longtemps après la mort de l’insecte.

Leurs résultats sont publiés dans la revue Science Advances.

 

Imagerie Raman de rayons X 3D d’une fourmi piégée dans l’ambre il y a 53 millions d’années dans l’Oise. La chimie du carbone révèle la préservation de signatures moléculaires de la chitine, mieux préservées sur la surface de la fourmi ayant été en premier en contact avec la résine. @IPANEMA
Imagerie Raman de rayons X 3D d’une fourmi piégée dans l’ambre il y a 53 millions d’années dans l’Oise. La chimie du carbone révèle la préservation de signatures moléculaires de la chitine, mieux préservées sur la surface de la fourmi ayant été en premier en contact avec la résine. @IPANEMA

Référence :
R. Georgiou, P. Gueriau, C. Sahle, S. Bernard, A. Mirone, R. Garrouste, U. Bergmann, J.-P. Rueff et L. Bertrand. Carbon speciation in organic fossils using 2D to 3D x-ray Raman multispectral imaging. Science Advances, doi : 10.1126/sciadv.aaw5019

 

Contacts scientifiques :
Loïc Bertrand, IPANEMA (CNRS, ministère de la culture, UVSQ ; Université Paris-Saclay), Jean-Pascal Rueff, Synchrotron SOLEIL et Uwe Bergmann, SLAC Stanford.